Pourquoi je continue le voyage.
13 août 2023. Voilà, Erwan est parti, on se retrouve début octobre… Et si cette première rotation se passe bien pour lui, on continuera sur ce rythme un mois d’absence, un mois de navigation ensemble. Est-ce bien raisonnable ? Est-ce que je fais le bon choix ?
Rentrer, oui !… mais pas tout de suite
Partis il y a maintenant presque 2 ans, pour un long voyage en famille, nous avançons à la voile, et nous ne sommes pas rentrés chez nous en cours de parcours. Nous sommes très heureux dans ce mode de vie, nomade, rustique, je pourrais continuer pendant des années, sauf que… depuis que nous sommes loin de chez nous, ma famille et mes amis me manquent énormément.
Des mariages et de nombreuses naissances, quelques décès aussi, ont marqué le temps depuis notre départ. Plus le temps passe, plus l’éloignement avec les personnes que j’aime est difficile a supporter. C’était particulièrement vrai pendant notre séjour en Polynésie car nous n’avancions pas, en attendant la fin de la saison cyclonique. A présent, nous sommes de nouveau en route, vers le retour, et l’idée de rentrer à la maison, même si cela prend encore un an, me donne des ailes !
Ma décision de continuer le voyage, même si Erwan ne sera là que la moitié du temps dorénavant, peut paraitre très paradoxale. Ne serait-il pas plus facile de décider d’arrêter ensemble ? On pourrait vendre le bateau en Nouvelle Calédonie et rentrer vite retrouver tout notre monde ! Suis-je réticente à la facilité ?
Transition professionnelle
Je le savais, d’une certaine manière cela faisant partie du « deal » avec Erwan. Il quittait la Marine, et ce voyage était une véritable étape de transition vers le monde du travail civil. Il y avait quelques CV imprimés dans la table à cartes dès le départ, et un carnet dans lequel je listais les idées de boulot, création d’entreprise, formation, les rencontres inspirantes… Parmi ces rencontres, un couple d’amis, à Tahiti, qui travaille dans les opérations marines off-shore. De fil en aiguille, Erwan avance et décroche quelques miles plus loin une promesse d’embauche dans le domaine de la sécurite maritime, fort intéressante. Une si belle opportunité, pas question de dire non et je le soutiens à fond dans sa démarche. Alors voilà, le travail commence fin août. Nous allons nous séparer en Australie, à Cairns, et nous retrouver à Singapour (inchallah), début octobre. Le challenge est grand, mais il en vaut la peine.
D’ailleurs en passant, pour moi aussi ce voyage constitue une transition professionnelle, j’en ai conscience et je la travaille avec passion.
A la poursuite de nos rêves
C’est vrai qu’on est fous tous les deux. Nous avons la chance de réaliser nos rêves en ce moment : fonder une famille, naviguer, passer du temps ensemble. L’essentiel est très clair à nos yeux : faire grandir notre famille en harmonie. On souhaite accueillir d’autres enfants, et donner le meilleur de nous même à Agathe, Suliac et au sein de notre couple, l’un à l’autre, dans le respect de ce qu’est chacun. En ce qui concerne le voyage, à ce stade, le rêve aurait pu diverger… Erwan préférerait que l’on arrête et que l’on rentre ensemble en France. Quant à moi, j’aurais préféré qu’il démarre son boulot dans quelques mois. Alors, qui doit céder ? Personne cette fois. On essaie de tout concilier, et de nous soutenir l’un l’autre, sincèrement. Être mariés, pour nous, c’est s’ajuster l’un à l’autre, régulièrement, avec plein d’amour et de don de soi, et avec la conscience de ce qui rend l’autre heureux.
De l’importance de se fixer un objectif
Les données du départ étaient : la naissance d’un bébé en Martinique, car nous avions la chance de partir en attendant cet heureux événement, et 2 ans pour nous consacrer à notre voyage. Force a été de constater, quand Suliac a fêté ses 2 mois et que nous avions toujours 1 an et demi de temps devant nous, que nous avions encore beaucoup de ressource. Nous avons alors mis le cap sur le Pacifique, sans pour autant bien définir un nouvel objectif. Tacitement, nous souhaitions revenir en Bretagne avec le bateau, mais sans oser en faire un objectif sinequanone car cela parassait trop gros de se lancer dans un tour du monde. Petit a petit, nous avons reconstitué notre caisse de bord, attendu la bonne saison, et traverse la seconde moitié de l’océan Pacifique. Maintenant on peut le dire, oui on voudrait faire revenir Vagabond a Locmiquélic, et boucler cette boucle magnifique. Le challenge nous paraît maintenant bien ajusté, les enfants sont heureux en mer et nous aussi. Si l’on s’arrêtait là, il me semble que je garderai toujours un sentiment d’inachevé. Je ne suis pas prête à mettre un point final au voyage encore, je ne me sens pas au bout. Mon amie Adji à qui je faisais part de ce sentiment, m’a fait remarquer que je ne me sentirais peut-être toujours pas vraiment au bout a notre arrivée en Bretagne, et que cette impression de non abouti pourrait me rester… Cela m’a fait réfléchir. J’espère que non, et que le fait d’avoir à présent clairement fixé l’objectif permettra au happy end d’advenir.
Grandir et assimiler les transformations
Cela prend du temps de se transformer de l’intérieur ! Le voyage est le lieu et le temps idéal, mais il faut lui laisser beaucoup de place. Et puis nous sommes des parents, donc on est aussi naturellement accaparé par le quotidien, dans toute sa merveilleuse trivialité. Après ces deux années, je pense avoir personnellement progressé en sommeil, en disponibilité et en lâcher prise sur le temps. Nous avons progressé en couple et dans notre rôle de parents. Agathe et Suliac sont des enfants en pleine forme, joyeux, gentils et malins. Ces progrès sont comme des trésors que je voudrais continuer à voir grandir et briller. Dans l’année qui vient, je vais donc essayer de prendre conscience de tous ces changements et de les approfondir encore un peu. Histoire de les rendre bien solides, et de ne pas les perdre a notre retour dans la vie d’avant.
Préparer le retour
Et justement… En parlant de ce retour, je pense que ce n’est pas une mince affaire que de bien le préparer. Réfléchir à des étapes pour que la transition ne soit pas trop rude 😜
On a eu l’idée de s’installer sur une île au début, et puis finalement on verra bien, c’est encore loin ! Mais sans décider maintenant de ce qu’on fera, juste garder en tête que l’on ne remettra pas nos chaussons exactement comme on les a quittés. Ne pas prévoir trop de projets pour le retour. Il nous faudra entretenir le souvenir mais ne pas laisser la nostalgie devenir mélancolie. Penser aussi que l’on ne pourra pas vraiment partager ce que l’on a vécu, sauf peut être avec ceux qui nous ont rejoints à bord en cours de route ? Ns amis et notre famille auront eu des vies très différentes de la nôtre et ce sera à nous de les écouter.
Mais quand on pense au retour, on pense surtout grande fiesta et retrouvailles !!! Ah ! Ça ! On a hâte !!!
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